Les symboles

 

Les symboles connaissent aujourd’hui une faveur nouvelle. L’imagination n’est plus vilipendée comme la folle du logis. Elle est réhabilitée, sœur jumelle de la raison, comme l’inspiratrice des découvertes et du progrès. Cette faveur due en grande partie aux anticipations de la fiction que la science vérifie peu à peu, aux effets du règne actuel de l’image que les sociologues essaient de mesurer, aux interprétations modernes des mythes anciens et à la naissance de mythes modernes, aux lucides explorations de la psychanalyse. Les symboles sont au centre, ils sont le cœur de cette vie imaginaire. Ils révèlent les secrets de l’inconscient, conduisent aux ressorts les plus cachés de l’action, ouvrent l’esprit sur l’inconnu et l’infini.

A longueur de jour et de nuit, dans son langage, ses gestes ou ses rêves, qu’il s’en aperçoive ou non, chacun de nous utilise les symboles. Ils donnent un visage aux désirs, ils incitent à telle entreprise, ils modèlent un comportement, ils amorcent succès ou échecs. Leur formation, leur agencement, leur interprétation, intéressent de nombreuses disciplines : l’histoire de civilisations et des religions, la linguistique, l’anthropologie culturelle, la critique d’art, la psychologie, la médecine.

On pourrait ajouter à cette liste, sans la clore pour autant, les techniques de vente, de la propagande et de la politique. Des travaux récents, et de plus en plus nombreux, éclairent les structures de l’imagination et la fonction symbolisante de l’imagination. On ne peut plus méconnaître aujourd’hui des réalités aussi agissantes. Toutes les sciences de l’homme, comme les arts et toutes les techniques qui en procèdent, rencontrent des symboles sur leur chemin. Elles doivent conjuguer leurs efforts pour déchiffrer les énigmes qu’ils posent : elles associent pour mobiliser l’énergie qu’ils détiennent condensée. C’est trop peu de dire que nous vivons dans un monde de symboles, un monde de symboles vit en nous. (…)

« Le symbolisme est une donnée immédiate de la conscience totale. C'est-à-dire de l’homme qui se découvre comme tel, de l’homme qui prend conscience de sa position dans l’univers; ces découvertes primordiales sont liées de façon si organique à son drame que le même symbolisme détermine aussi bien l’activité de son subconscient que les plus nobles expressions de la vie spirituelle.» Mircea Eliade.

Aussi le symbole dépasse-t-il les mesures de la raison pure, sans pour autant tomber dans l’absurde. Il n’apparaît pas comme le fruit mûr d’une conclusion logique, au terme d’une organisation sans faille. L’analyse qui fragmente et pulvérise est impuissante à saisir la richesse du symbole; l’intuition n’y parvient pas toujours; elle doit être éminemment synthétique et sympathique, c’est-à-dire, partager et éprouver une certaine vision du monde. Car le symbole a pour privilège de concentrer sur la réalité de départ, lune, taureau, lotus,, flèche toutes les forces évoquées par cette image et par ses analogues, à tous les plans du cosmos et à tous les niveaux de la conscience. Chaque symbole est un microcosme, un monde total. Ce n’est pas en accumulant les détails par l’analyse qu’on en saisit le sens global: il faut un regard quasi synoptique. Un des traits caractéristiques du symbole est la simultanéité des sens qu’il révèle.(…)


Extrait de l’introduction du livre « Dictionnaire des symboles »…. Mythes, rêves, coutumes, gestes, formes, figures, couleurs, nombres. Jean CHEVALIER, Alain CHEERBRANT ;

 

 
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